François Bayrou, tout comme Sarkozy reste très discret sur ce qu’il conçoit du contrat de travail. Fort heureusement, les sénateurs socialistes ont rassemblé dans un document quelques informations utiles. Vous trouverez ici un extrait commenté d’un des chapitres de leur document.

L’UDF toujours du coté du moins disant social

Si Sarkozy a pour crédo économique « Travailler plus pour gagner plus », l’UDF ne se différencie guère. En effet la même logique se trouve dans les propositions de Bayrou, et lui aussi veut favoriser financièrement les heures supplémentaires en les payant 25% plus cher que la normale, et sans charges sociales.

D’ailleurs n’est ce pas la majorité UMP-UDF qui a augmenté le quota d’heures supplémentaires en 2002, et passé leur coût a 10%, au lieu des 25% prévus.. par la loi votée par l’assemblée de gauche sortante ? Cet épisode a été oublié, mais il faut le rappeller , comme le fait le blog Et Maintenant : les heures supplémentaires à 25% pour tous, ce qui est le programme de Bayrou et de Sarkozy… étaient déja dans la loi Aubry II votée en 2000 par l’assemblée de 1997.
Elles sont devenus majorées d’au moins 10% dans les entreprises de plus de 20 salariés dans le cadre d’un accord de branche, et par “10% jusqu’au 31 décembre 2008” pour la majorité des autres.
Et cela suite à un vote par l’assemblée nationale en octobre 2002 : UDF et UMP ayant voté cette régression sociale. Ils sont désormais tous les deux a réclamer le vote de ce qu’ils ont aboli en 2002.

Sur la loi portant réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise, la sénatrice UDF Anne-Marie PAYET déclare que ce texte est une réponse à « l’attente légitime des Français pour exercer leur choix entre repos et rémunération », comme si dans l’entreprise le salarié pouvait effectivement choisir. Ce libre choix n’est possible que pour les cadres supérieurs déjà rémunérés au forfait exprimés en jours annuels. il est évident que cette liberté ne sera pas accessible à la caissière, à la vendeuse qui a un contrat à temps partiel imposé, inférieur à 30 h et donc loin des heures supplémentaires.

Libéral s’il en est, BAYROU déclare le 21-02-06 à l’AN « nous proposons d’aider l’entreprise, de la libérer, et non de la lier encore plus, de la contrôler encore plus, de la taxer encore plus, de lui promettre encore plus de punition et de répression ».
Parlant du projet socialiste sur les entreprises, il précise « c’est exactement l’inverse que nous préconisons ». il aura donc du mal à faire un gouvernement avec les meilleurs de gauche et de droite, à moins que ces meilleurs ne soient que des faux nez de Spartacus ou des Gracques.

Ainsi et de manière emblématique, l’UDF au Sénat a même présenté un amendement autorisant le travail des mineurs dès 13 ans, dans le cadre de la loi « Egalité des chances ».

CNE, CPE, les parlementaires UDF se divisent

En 2005, Bayrou condamne le CNE, les députés UDF votent contre, les sénateurs se désunissent (25 abstentions, 8 votes pour). Le leader centriste peine donc à rassembler ses propres amis.
L’année suivante, Bayrou s’oppose au CPE, mais déclare au Progrès de Lyon, le 28 janvier 2006 : « Si l’on avait dit : on va proposer un contrat durable avec six mois à l’essai, j’aurais été d’accord. Mais deux ans et renouvelable ! ».

voilà donc la durée de la période d’essai idéale pour Bayrou : 6 Mois, ça fait beaucoup de temps pour qu’un employeur se rende compte de la compétence d’un salarié. Il faut rappeler que 90% des CDD font moins de 6 mois, donc un contrat “Bayrou” permettrait aux entreprises de faire du CDD renouvelable à volonté en usant de la période d’essai de 6 mois, avec période d’intercontrat ou échanges de salariés.

A l’AN, l’UDF refuse de prendre part au vote sur la motion de censure déposée par le PS sur le CPE.

Au Sénat, Michel MERCIER, président du groupe centriste, observe une position bienveillante vis-à-vis du CPE, approuvant le principe de « plus de flexibilité pour l’entreprise » et demandant en retour « plus de droits pour le salarié » pour rendre le dispositif « équilibré et acceptable ». Il défend deux amendements visant notamment à réduire la période d’essai de 2 à 1 an et à imposer une justification écrite de la rupture du CPE.
Lors des débats, Philippe NOGRIX, sénateur UDF, déclare le 5 mars 2006 : « l’angle de lecture du CPE change, pour peu que l’on accepte de considérer que les intérêts de l’employeur sont ceux de l’entreprise et que ceux de l’entreprise sont ceux de l’employé auquel elle propose un travail » Il ajoute, au sujet des relations employeur/jeune salarié : « je te donne, tu me donnes, on échange un savoir faire contre des conditions de travail ».
Gisèle GAUTIER, à l’époque sénatrice UDF et depuis ralliée à l’UMP, estime le 5 mars 2006 que « la rigidité de notre code du travail favorise la précarisation de ceux qu’il est censé protéger ». Elle ajoute au sujet du CPE : « il flexibilisera le marché du travail grâce à la période de consolidation qu’il institue. Il me semble que c’est un élément très positif, d’un message de confiance adressé aux entreprises. (…) S’il apporte d’avantage de flexibilité, le CPE est en même temps très protecteur ». Puis conclut par cette envolée : « le CPE est l’un des contrats les plus protecteurs qui soient ».
Cette dame n’a donc jamais enchaîné 4 CDD identiques en 2 ans pour une entreprise cotée au CAC40 , ou même être pris en CDD sur un poste repris par un CDI plus tard, toujours dans la même entreprise dont l’état est actionnaire !
Au final, les sénateurs UDF se partagent entre 20 abstentions et 11 votes pour, permettant ainsi l’adoption de la loi. Ce qui semble motiver l’opposition de l’UDF au CPE, c’est donc plus la méthode et les modalités que le principe lui-même de précarisation des jeunes salariés.

Bayrou favorable au maintien du CNE

Courtisant les PME, Bayrou veut maintenir le CNE. Il déclare le jeudi 15 mars : « Je n’ai jamais dit que j’allais supprimer le CNE ». Pour le moment, il s’en tient à l’évaluation légale prévue au bout des deux ans d’expérimentation. Le 15 mars dernier, devant la CGPME, il ose déclarer que le CNE « n’a pas les mêmes inconvénients » que le CPE car ce dernier « était concentré sur les plus jeunes ». Dans son livre Projet d’espoir, il affirme que « la hantise de ne pouvoir mettre un terme au contrat de travail est un frein puissant à la création d’emploi ».

Le MEDEF ne dit pas autre chose. Pour preuve, après la crise du CPE, Laurence Parisot se déclarait convaincue, d’après le Figaro, de la « nécessité de réduire les risques de contentieux pour favoriser l’embauche ». Dès lors, souhaitant simplifier le droit du travail, Bayrou prône la création d’un CDI universel à droits progressifs « avec une période d’essai suffisante pour permettre de la souplesse en conservant de la sécurité » (interview à l’Usine nouvelle, 15 mars 2007). Il se caractérise par « une période d’essai raisonnable et clairement délimitée, par exemple de 6 mois » (intervention à L’AN le 21-02-06), ce qui porterait la durée potentielle de la période d’essai à 1 an compte tenu de son caractère renouvelable. Ce contrat s’apparente donc au dangereux « contrat de travail unique » défendu par Sarkozy et présenté par ce dernier comme moins contraignant.

Bayrou pour un contrat de travail unique précaire

Enfin Bayrou vient de se déclarer favorable au principe de la « rupture par consentement mutuel » du contrat de travail, sans toutefois en préciser les modalités. Ceci fait écho au concept de « séparabilité à l’amiable », développé à plusieurs reprises par Laurence Parisot, et déjà repris à son compte par Sarkozy lors d’un meeting (le 6 mars, à Cormeilles-en-Parisis : «il faut prévoir dans l’entreprise une procédure de rupture par consentement mutuel, comme dans les familles il y a désormais un divorce à l’amiable »).

Si elle était appliquée, cette proposition mettrait tout salarié à la merci de son employeur. En effet, la réalité démontre que la relation employeur-employé est un rapport de subordination.
Elle est même définie comme telle par le code du travail. On ne saurait donc l’assimiler à la situation des époux souhaitant divorcer d’un commun accord. En outr
e, la rupture amiable du contrat de travail existe déjà en droit français, avec comme conséquence que le salarié ne peut percevoir l’assurance-chômage.

Dès lors, cette proposition ne peut reposer que sur l’objectif de faciliter les voies de licenciement en remplaçant l’actuel droit de licenciement (aujourd’hui équilibré par un droit à indemnités et un droit de recours) par une rupture brutale et expresse du contrat de travail, sans possibilité de contestation devant le juge, sans possibilité de réintégration ni dommages intérêts.


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