Le chômage, la BCE, le NAIRU et les stocks de précaires..
Je lis “Pas de pitié pour les geux“(4.60€), d’un économiste qui essaye de démonter les théories conneries économiques actuelles, sur le chômage, la précarité et les mythes sur les salariés fainéants, incapables et l’inflation. J’ai découvert hier soir un excellent billet sur le site équilibre précaire… Allez le lire, et vous allez comprendre un peu plus ce dont je vais vous parler ici. Attention, mon billet est écrit en mode GRRRRR, il y’a des injures et des envie de baffe.
Je vous avait déjà sans doute expliqué que mon banquier m’avait dit “bienvenue dans la précarité” un jour, et que depuis je lui rapporte plus d’argent en frais et agios qu’un couple de rentiers plaçant son fric. Ce préalable est posé, et depuis j’alterne CDD et chômage. Que personne ne me sorte le laïus habituel libéral sur les salariés fainéants et bons à rien: J’ai eu 100% de ma part variable chez France Télécom et j’aurai pu avoir un brevet à mon nom. Je connais donc quelques précaires, et cette précarité ne concerne pas que les métiers de base. On peut être cadre supérieur en CDD de 4 mois reconduits en toute illégalité pendant 2 ans. Même avec un salaire net de 3300 € votre banquier peut vous insulter, et les logiciels d’analyse et de scoring de son système informatique vous noter négativement pour mieux vous presser tel un citron tant qu’il y’a du fric. Un Vampire donc, sans le charme romantique du personnage.
Dans pas de pitié pour les geux, l’auteur Laurent Cordonier démonte les mythes sur le marché du travail, et du taux de chômage. En conclusion, il explique que tout cela résulte d’un équilibre. La banque centrale européenne est obsédée par l’inflation, si celle-ci passe de 2% à 2.1% ils flippent et appellent maman! Vous ne me croyez pas, alors prenez le temps de lire les pages saumon du figaro, la Tribune et autres torchons sur l’économie réelle. Regardez BFM, Bloomberg et LCI, chaînes d’information pour nantis et dotés.
Je me souviens d’une époque où l’inflation atteignait 12%, à cette époque la France était gérée par le meilleur économiste du Monde. C’était Raymond Barre, celui qui nous expliquait que les profits d’aujourd’hui sont les emplois de demain. Les profits ont explosé, et l’emploi a implosé. Il y a donc matière à remettre en doute les théories économiques. A moins que tous les économistes ne nous avouent maintenant que Barre était un imposteur et une burne. Chiche?
On connait aussi des prix Nobel d’économie qui ont fait des faillites monumentales en appliquant les théories leur ayant valu le Nobel. Un étudiant qui triche à un examen se voit sanctionné par le retrait de l’examen, un prix Nobel ne craint pas cette sanction. Pourtant certains sont des gros cons, voire même des crétins.
Cela n’empêche pas des journalistes flagorneurs de défendre ces théories néo-libérales ayant autant de consistance intellectuelle que l’horoscope de RTL. On nous explique donc que l’inflation est dangereuse pour la croissance. Mais on ne parle pas de la même croissance, là c’est celle du paquet de fric des nantis dont on parle. Si l’inflation augmente qui perd le plus? ce qui en ont le plus. Rajoutez à cela le concept loufoque du taux de chômage naturel et vous allez tout comprendre. Ce concept abject est né dans l’esprit fumeux de Milton Friedman grand penseur du néo-libéralisme au regard torve.
Pour nos libéraux, ce taux de chômage naturel est celui qui limite l’inflation. Cela peut vous paraitre incongru comme idée, voir obscène, mais elle existe. En effet selon eux un certain volume de chômage diminue les tensions sur le marché du travail. De quelles tensions parlent ils ? des salaires bien sûr. Plus le chômage est bas, plus les salariés peuvent changer de travail et faire jouer le marché de l’emploi en leur faveur. Ils négocient des salaires plus élevés à l’embauche et demandent des augmentations une fois embauchés. Comme l’explique l’auteur cette théorie est partiellement vraie. Mais que c’est il passé dans les années 1998-2000? le chômage a baissé et l’inflation aussi, alors que les salaires dans les NTIC et services ont crû de manière importante et bien au delà de l’inflation. Sauf que ce taux de chômage naturel, le NAIRU est estimé pour la France à 9%. Si cette estimation est aussi scientifique que la fameuse courbe de lafer… on peut douter de la véracité de la théorie. D’ailleurs on démontre sa fausseté par l’absurde.
En effet il suffit d’un faible stock de chômeurs pour foutre le bronx dans le marché si on suit leur théorie odieuse. ce faible stock créerait une tension locale sur le marché de l’emploi et par effet boule de neige l’étendrait sur la totalité du marché maintenant que le monde économique est plat. Il suffit donc dans l’absolu d’un seul chômeur pour initier le mouvement inflationniste.
Comme l’a fait remarquer le blog équilibre précaire, le SENAT a discuté de ce NAIRU, et on trouve même de la documentation sur le sujet chez nos amis de l’OCDE. IL y a un gros .pdf qui explique tout, donne la formule magique et la valeur pour la France: 8 ou 9%. Tout cela est exprimé de façon mathématique, c’est modélisé à coup d’intégrales et de séries. C’est donc sérieux. Bien sûr, tout comme l’étaient nos compères Nobel en slip: MERTON et SCHOLES dont le fond LTCM a fait faillite un an après la remise du nobel.
Bref, tout cela n’est qu’un vaste bidonnage. Et notre BCE est là pour éviter que l’inflation ne dépasse pas 2.0% au niveau de l’UE, c’est dans son ADN , ses statuts. Nos banquiers centraux font donc tout pour éviter l’inflation, et comme l’explique L.Cordonier, ils passent leur temps à chasser le fantôme de l’inflation et à justifier leur “travail” : Vous voyez l’inflation est vaincue, nous avons raison. Et de couiner à chaque “poussée” inflationniste, un peu comme si vous craigniez un cancer par ce que votre température corporelle passe de 37.2 à 37.5°C en fin de journée. Comme les salaires sont la seule source d’inflation sur laquelle on peut agir par pression ( étrange, si on suit leur logique ce marché devrait être libre?), l’existence d’un stock de chômage est nécessaire et l’action de la BCE et des dirigeants vise avant tout à juguler l’inflation, et par conséquent la dette publique.
En 20 ans, les salariés ont lâché 11% de PIB aux rentiers et vampires en tout genre, et comme l’a dit Wim Duisenberg ex-grand banquier central en parlant de la lutte contre l’inflation, il s’agit “d’un signal envoyé au marché du travail.” C’est dans les échos du 17-18 mars 2000. Nos 20% de précaires et 9% de chômeurs sont donc nécessaires pour maintenir l’inflation à 2%, pour que le fruit de la rente ne s’envole pas et ruine ainsi les années d’esclavagisme par les nantis. Quand on voit que les dividendes d’actionnaire sont en hausse constante supérieure à l’inflation on peut s’étonner et se révolter non ? D’ailleurs Trichet notre ancien grand argentier fait exactement la même politique. C’est tellement grotesque que même Sarkozy a couiné contre la BCE… mais uniquement pour la forme, il n’ira pas au delà de sa comédie devant les caméras.
La première victime de l’inflation c’est le rentier, et ce surtout dans une économie régulée où son profit est limité par l’intérêt général.Vous comprenez donc l’intérêt des néos-cons au pouvoir : Donner l’illusion de lutter contre le chômage en favorisant la précarité et déréguler au maximum pour que les rentiers jouissent du système. Dans cette olgarchie politico-financière on maintient la pression sur les salariés via ce stock de précaires ( 20% de la population active en
gros) et de chômeurs.
Vous ne me croyez toujours pas? Alors regardez cette vidéo trouvée grâce au blog équilibre précaire. On y voit un analyste financier nous expliquer que la baisse relative du chômage rend la BCE nerveuse! Voilà vous avez compris, le chômage n’est pas un fléau. C’est une variable d’ajustement des profits des nantis et ce aussi bien chez nous qu’au plus profond de la Chine. Travailler plus pour gagner plus pas grand chose, et si tu n’es pas content de ton maigre salaire on te remplace par un élément du stock d’ajustement de chômeurs.
Alors convaincu? Allez voir le site Web le NAIRU, le nom de la ruse, par un citoyen vigilant que je salue. Et dites vous bien que cette politique abjecte ne va pas dans l’intérêt de toutes les entreprises et de tout le patronat. On en trouve beaucoup qui comprennent que leur intérêt est le même que celui de leurs salariés dans une stratégie de type donnant-donnant. Il serait peut-être temps qu’ils ne confient plus leur intérêts à des syndicats comme le MEDEF. N’oubliez pas non plus que la BCE a sorti 300 Milliards d’€ pour soutenir les banquier verreux dans la crise des surprimes, et que cet argent aurait pu servir pour financer l’innovation et l’intelligence et non la rente. Nos sénateurs UMP sont partisans de cette théorie du NAIRU dont ils voient des éléments de preuve dans quelques années de statistiques, ce qui n’a pas grande valeur scientifique.
De plus on peut se poser des questions sur la légalité des statuts de la BCE au regard de notre constitution qui garantit le droit au travail. Si les statuts de la BCE valident le droit au chômage “naturel”, ils sont alors de-facto anticonstitutionnels.
Je vous parlais de 11% de PIB qui sont passé du travail au capital en 20 ans. Ce sont 150 milliards d’euros qui passent du travail au capital chaque année. Et la proportion est voisine dans toutes les autres nations de l’UE et de l’OCDE. Même chez ceux où le chômage est parait-il inférieur au notre et où l’inflation est voisine. Les chiffres de l’OCDE sont là, cette théorie du Nairu est donc contredite par la réalité en plus d’être abjecte.
Alors, mesdames et messieurs les Politiques ( de gauche bien sûr), intéressez vous à ce que vivent les précaires et comme tout se tient on pourra peut être espérer vivre un peu mieux.
Technorati Tags: Intox, liberalisme, BCE
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Merci de citer équilibre précaire.
Cette histoire de Nairu nous a occupé depuis longtemps avec Nicolas. Nous avons beaucoup lu le site de Guillaume de Baskerville.
J’en avais parlé (par hasard) avec un patron de journal du soir et il avait qualifié cette théorie de fantaisiste (http://lenairu.blogspot.com/2006/05…)
Mais j’ai aussi discuté avec un élève de DSK (cet “homme de gauche” si apprécié dans les soirées) et il m’a confirmé que ça faisait partie des cours d’économie classique que donnait DSK. Bref, le nairu n’est ni un secret ni quelque chose dont on parle tous les jours. C’est une théorie qui n’a pas beaucoup été vulgarisée.